COMPTE-RENDU DE LA MISSION DU 6 MARS au 5 AVRIL 2014
Mission de fonctionnement de l’école : par Anne-Marie MIGNET
Un séjour marqué par des émotions intenses dans les extrêmes : du sordide au sublime ! Ce n’est pas exceptionnel mais je suis plus ou moins touchée selon mon degré de sensibilité et la contagion qui s’installe par rapport aux angoisses et peurs qui gagnent la majorité de la population de Fort-Dauphin. Des faits réels qui nous atteignent : Nazotoa, notre instituteur s’est fait agresser en rentrant chez lui un soir.
Je constate aussi que la misère entraîne une perte des valeurs humaines essentielles. Analyse confirmée par Majid Rahnema dans son livre « Quand la misère chasse la pauvreté » où il dit : « Nous savons que l’indigence ne mène pas nécessairement à la misère morale, mais les faits hélas ! montrent qu’elle en est trop souvent capable. Et lorsqu’elle se manifeste, cette misère se traduit toujours par une ‘altération du caractère, de la volonté, de la lucidité, de l’esprit et de l’âme… ».
Une règle à respecter ne pas sortir à pied, le soir…
La nature est toujours aussi époustouflante de majesté dans ce bout du monde !
Je prends soin de mon immunité afin de remplir au mieux la mission que je suis venue remplir.
Rappel des objectifs :
- Finaliser sur place la comptabilité malgache afin de l’inclure dans la comptabilité française
- Prendre le relais pour la suite des interventions des vendredis tous les 15 jours
- Régler les charges Cnaps de nos salariés
- Rechercher une solution pour la gestion des parrainages
- Etre le trait d’union pour le projet Environnement entre S. Culier et Sylviane afin de redéfinir certains aspects du projet
Un aspect administratif lourd pour cette mission qui m’a retenu presque 12 jours complets à Fort-Dauphin. Lorsque notre organisation sera suffisamment installée et que nous aurons sur place un bureau (lieu et personne) les séjours à Fort-Dauphin seront plus courts. Je suis toujours heureuse de parcourir les rues de Fort-Dauphin à pied et de croiser tout ce monde, souriant malgré tout, qui marche, marche, marche….
La comptabilité n’a pas été faite comme nous le souhaitions : les personnes engagées n’ont pas tenu leurs engagements. Je reviens une fois de plus avec tous les documents malgaches (extraits de compte, factures, souches de chéquier pour l’année 2013) et j’envoie le tout à Noëlle Simonin qui veut bien s’y attaquer. J’ai commencé à prendre des contacts pour un comptable sur place qui ferait aussi les paiements CNaPS tous les trimestres.
Le règlement de nos intervenants tous les quinze jours demande aussi la présence d’une personne pour la signature des chèques. A noter que le transport est passé de 150 000 ariarys à 170 000 ariarys.
La CNaPS (Centre National de Prévoyance Sociale) est une administration très lourde et complexe. Elle reçoit nos cotisations et reverse aux salariés 2 000 ariarys d’allocations familiales par enfant et par mois. Elle est également garante du versement d’une retraite lorsque les salariés arrivent en fin de carrière. Par contre, elle ne rembourse pas les frais médicaux qui restent à la charge du salarié. Notre association rembourse systématiquement tous les frais médicaux de nos salariés et de leurs familles.
Pour les parrainages, il sera nécessaire et utile de redéfinir notre posture sur plusieurs plans :
- la continuité de l’action par Zanaky Lokaro
- le ciblage des enfants que nous désirons aider à la poursuite de leurs études
- la problématique particulière pour les filles
Pendant ma présence à Lokaro j’ai réuni les filleuls et leurs parents afin de faire le point avec eux sur l’utilisation des fonds reçus par les parrains et marraines et ce que cela implique comme retour de leur part. Une rencontre très paisible où l’écoute et l’échange ont été très présents. Les mamans étaient particulièrement jolies dans leurs plus beaux vêtements.
L’association Aide et Action présente à Fort-Dauphin ne s’occupe que des parrainages des enfants qu’elle scolarise. Une piste avec une jeune fille étudiante que j’exploiterai davantage à mon prochain séjour afin de nous alléger sur cette gestion importante, peut être une solution envisageable si nous y mettons le cadre.
Le lien avec Sylviane pour le projet « environnement » a pu se faire grâce à un accompagnement-échange avec Stéphanie et Manu. Nous avons reposé des bases de simplicité et réalité qui vont permettre de repartir sur de nouvelles données en fonction de l’expérience du terrain. Il sera nécessaire de faire le point en fin d’année scolaire pour la poursuite de l’action. Une évidence dont il est utile de prendre conscience c’est notre accompagnement bienveillant.
Ma présence à Lokaro était très courte et je n’ai pas ressenti le besoin d’agir : juste être là dans l’espace sacré du cœur en partage de vie tout simplement…
Myriam avait préparé une liste d’enfants particulièrement sous-nutris (34 sur 80) et je leur ai fait prendre la spiruline-confiture chaque jour à la récréation du matin : grand succès avec le goût sucré à tel point que ceux qui n’étaient pas sur la liste avaient des yeux d’envie ! A mieux préparer si nous voulons refaire ce traitement car il faut un stock de confiture important ! Les confitures sont faites et offertes par une amie (Miclo) de Fort-Dauphin.
J’ai aussi proposé les traditionnelles séances « shampoing-douche-lessive » par groupes de 4 enfants : les filles le matin, les garçons le soir ! Ils adorent, et moi aussi ! L’école leur offre un cadre très confortable pour cela : des seaux et des bassines en suffisance, du savon tant qu’on veut, du shampoing en quantité… Ils apportent leurs vêtements de rechange et lavent les vêtements qu’ils ont sur eux. Le pied ! J’ai suggéré aux instituteurs l’organisation à l’école d’une possibilité de le faire à tout moment pour tous ceux qui en ont envie en autonomie… ils sont réticents.. ils ne font pas confiance aux enfants sur le respect du matériel… peut-être que l’an prochain je peux les aider pour cette mise en place ?
Plusieurs concertations pédagogiques avec les maîtres où j’ai essayé de ne pas intervenir sauf pour leur dire que l’an prochain sera « année de l’autonomie et de la coopération » où nous mettrons en place ensemble des « outils » pour ça.
Pour conclure sur une note joyeuse de l’intensité sublime : j’ai été particulièrement choyée par les parents d’élèves. Une délégation est venue m’offrir 2 poulets et me souhaiter une bonne année. Plusieurs mamans d’enfants parrainés m’ont offert des cadeaux de vannerie pour moi et pour certains parrains/marraines. Les plus grands des enfants qui ont fait leur scolarité à l’école Zanaky Lokaro sont toujours très proches et viennent me rendre visite. Fliastre notre mentor au collège en 5è s’est placé pour être instituteur à Zanaky Lokaro !
UNE ACTION A POURSUIVRE AVEC VOUS TOUS.
Anne-Marie MIGNET